Etudier le lien entre activité des dorsales et climat avec Tectoglob3D

par Philippe Cosentino

Le Crétacé est une période marquée par un climat très chaud, ce qui en fait un bon modèle d’étude pour appréhender les mécanismes à l’origine des changements climatiques.

Dans le programme de spécialité de terminale (partie “Les climats de la Terre : comprendre le passé pour agir aujourd’hui et demain “), on peut relever en tant qu’objectif cognitif :

“Au Mésozoïque, pendant le Crétacé, les variations
climatiques se manifestent par une tendance à une
hausse de température. Du fait de l’augmentation
de l’activité des dorsales, la géodynamique terrestre
interne semble principalement responsable de ces
variations.”

Dans cet article nous vous proposons d’exploiter certaines fonctionnalités du logiciel Tectoglob3D permettant de mettre en évidence cette augmentation de l’activité de la dorsale Atlantique au Crétacé.

Plus précisément nous allons montrer comment calculer la vitesse d’expansion du plancher océanique, en admettant que celle-ci dépend en grande partie de l’activité de la dorsale.

 

Affichage et lecture de l’âge du plancher océanique

Pour calculer la vitesse d’expansion du plancher océanique nous aurons besoin de calculer l’âge du plancher océanique, c’est à dire l’âge du basalte situé sous la couche de sédiments.

Cet âge est donné par la carte accessible via le menu “Données affichées / Cartes géologiques / Age du plancher océanique”.

Cette carte apparaît alors projetée sur le globe virtuel. Le code de couleurs donnant la correspondance avec les âges est affiché en bas de la fenêtre de ce globe.

Carte de l’âge du plancher océanique projeté sur le globe virtuel.

 

Distinguer les différentes nuances de vert n’est pas chose aisée sur cette carte, mais heureusement  il est également possible de lire l’âge (ou plutôt l’intervalle correspondant à la légende) du plancher océanique simplement en survolant la carte avec la souris.

Lorsqu’on survole la carte avec le curseur de la souris, l’âge apparaît sous la forme d’un encadrement.

 

Enfin, une autre méthode permet de lire l’âge des fonds océaniques : si l’on double-clique sur la carte, et à condition qu’aucune action (coupe etc.) n’est sélectionnée, l’âge du plancher correspondant à la position du curseur, ainsi que d’autres informations, est affiché dans la fenêtre de résultats à droite.

Informations affichées suite à un double-clic sur le globe. Notez que le Moho etc. n’apparaîtront que s’ils ont été sélectionnés dans les données affichées.

 

Nous recommandons plutôt de lire l’âge au survol, cette méthode étant la plus simple.

 

Mesure des distances

Afin de pouvoir calculer la vitesse d’expansion (v=d/T) il est nécessaire de pouvoir mesurer la distance entre 2 points du globe.

Pour mesurer une distance il suffit d’aller dans le menu “Actions/Mesurer une distance”.

En cliquant sur 2 points du globe, un arc est tracé, et sa longueur affichée dans la fenêtre de résultats à droite. On prendra évidemment la longueur de l’arc (distance “à vol d’oiseau”) et non de la corde, la Terre étant subsphérique.

Les différentes distances entre les points A et B sont affichées dans la fenêtre de résultats.

 

Calculer la vitesse

Plusieurs approches sont possibles, l’essentiel est de vérifier que la démarche de l’élève est cohérente.

On sera particulièrement vigilant au fait qu’il mesure les distances sur le même “arc” perpendiculaire à la dorsale (ces arcs sont faciles à identifier car ils correspondent aux failles transformantes), étant donné que la vitesse d’expansion varie en fonction de la distance au pôle eulérien. Si l’élève mesure, pour un même intervalle d’âge, une distance près du tropique du Capricorne (loin du pôle eulérien) et une autre près de l’Islande (près du pôle eulérien), cette dernière distance sera très sous-estimée.

Réalisons donc une telle mesure, en détaillant chaque étape.

Tout d’abord choisissons un arc bien visible pour réaliser les 2 mesures, ici repassé en bleu sur cette capture d’écran. Nous nous limiterons à la dorsale Atlantique.

 

A présent, mesurons la distance sur cet arc entre la limite correspondant à 80Ma et la limite 140 Ma (d’autres intervalles sont acceptables bien entendu, tant qu’ils sont dans le Crétacé).

 

Connaissant la vitesse et la distance, nous pouvons enfin calculer la vitesse.

T = 140 – 80 = 60 Ma

d = 982 km

v = 982 / 60 ≈ 16 km / Ma

Cette distance correspond à l’expansion d’un seul côté du plancher océanique. Si l’on souhaite avoir la vitesse d’expansion totale, il faut multiplier cette vitesse par 2.

vt ≈ v x 2 ≈ 32 km / Ma

 

Réalisons à présent une mesure de distance sur le même arc, mais durant le cénozoïque, sur les 60 derniers millions d’années.

d = 790 km

T = 60 Ma

v = d / T ≈ 13 km / Ma

vt ≈ v x 2 ≈ 26 km / Ma

Comme on peut le constater, la vitesse d’expansion du plancher océanique est effectivement plus élevée durant le Crétacé que durant le Cénozoïque. On obtiendrait le même résultat en comparant avec le Jurassique.

 

Une autre approche, plus graphique

Tectoglob3D dispose d’une fonctionnalité qui permet de visualiser directement sur un graphique l’expansion océanique.

Pour cela il suffit, une fois la carte des âges du plancher océanique activée, d’aller dans le menu “Actions / Profil de l’âge du plancher océanique”.

L’utilisateur est alors invité à tracer, en deux clics un profil sur le globe (comme pour faire une coupe ou mesurer une distance). Une fois ce profil défini, un graphique apparaît à droite de l’écran avec en abscisse la distance et en ordonnée l’âge du plancher.

Exemple de graphique obtenu pour un profil réalisé sur le même arc que précédemment.

 

On constate alors que la pente de ce graphique est plus faible au Crétacé (vert) que durant le Jurassique (bleu) ou le Cénozoïque (orange/rouge).

Or sur ce graphique, plus la pente est faible, plus la vitesse est élevée (puisque une pente faible signifie ici qu’en peu de temps (y) une grande distance (x) a été parcourue).

Ainsi on peut déduire de la lecture directe de ce graphique que la vitesse d’expansion du plancher était plus élevée durant le Crétacé.

A vous de voir l’approche que vous préférez, mais la première approche (v=d/T) a le mérite de s’appuyer sur des valeurs.

 

Visualiser la Terre au Crétacé avec Tectoglob3D

Même si cette activité complémentaire n’a pas de lien direct avec le calcul de la vitesse d’expansion du plancher, elle contribuera à mieux appréhender la configuration tectonique du globe durant le Crétacé.

En allant dans le menu “Actions / Extras / Disposition passée des continents”, l’élève pourra “remonter le temps” et voir à quoi ressemblait le globe durant le Crétacé.

Deux modèles sont à sa disposition (voir en bas à droite de l’écran), le modèle de Muller et al, qui permet d’afficher en complément l’âge du plancher océanique … dans le passé, et le modèle de Scotese, moins précis, mais visuellement plus parlant pour les élèves.

En utilisant le modèle de Scotese et en remontant (grâce au curseur en bas à droite) le temps, l’élève pourra ainsi de lui même constater qu’une grande partie des continents, très morcelés (beaucoup de côtes), étaient recouverts … par la mer (mer continentale). On constate également l’absence de toute calotte polaire.

La Terre il y a 83 Ma selon Scotese.

 

D’une part cela confirme que le niveau de la mer était plus élevé au Crétacé, élévation que l’élève peut être amené à mettre en relation avec l’activité des dorsales et avec le réchauffement.

D’autre part, la mer ayant un albédo plus faible que les différents sols, on est là en présence d’un rétrocontrôle positif (plus il fait chaud, plus le niveau de la mer monte, plus l’albédo moyen diminue et plus la Terre absorbe d’énergie solaire, etc.) qu’il serait très intéressant de souligner.

 

Conclusion

L’exploitation de Tectoglob3D dans le cadre de l’étude du climat au Crétacé est donc parfaitement opportune.

D’une part, elle amène l’élève à extraire les données utiles d’une carte géologique et à les traiter mathématiquement afin de mettre en évidence l’activité accrue de la dorsale Atlantique au Crétacé. La complexité de cette tâche est en soi une bonne démarche en vue de la préparation aux  ECE (Evaluations des Capacités Expérimentales).

D’autre part, elle permet à l’élève de visualiser la Terre au Crétacé, et de réaliser à quel point la configuration tectonique globale de la Terre était différente et propice à un climat chaud.

Enfin, c’est l’une des rares occasions de réinvestir le savoir faire acquis en classe de première sur ce logiciel, qui peut également être utilisé dans le cadre de la partie “À la recherche du passé géologique de notre planète”.

 

Lien vers Tectoglob3D

https://www.pedagogie.ac-nice.fr/svt/productions/tectoglob3d/

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