Modéliser le rôle joué par le moustique dans la transmission du paludisme

par Philippe Cosentino

 

Place dans le programme

En classe de seconde, les maladies vectorielles, c’est à dire pour lesquelles l’agent pathogène est transmis par un vecteur animal, font partie des notions explicitement attendues.

Extrait du B.O. :

Certaines maladies causées par des agents pathogènes sont transmises directement entre êtres humains ou par le biais d’animaux tels que les insectes (maladies vectorielles).

Nous proposons ici une activité de modélisation (utilisant le logiciel Edu’modèles) qui viendra compléter une séance consacrée à l’étude de la transmission du paludisme.

 

Place de la modélisation dans le scénario pédagogique

Nous recommandons d’accompagner cette activité numérique de l’exploitation d’autres supports, documents ou mieux lames microscopiques à observer (pièces buccales de moustique, sang d’un individu contaminé par le plasmodium …).

Nous recommandons surtout de ne pas débuter la séance par la modélisation, la situation déclenchante doit être concrète (par exemple une vidéo montrant le phénotype associé au paludisme, ou bien selon la problématisation souhaitée, les moyens déployés pour lutter contre le moustique anophèle dans les régions touchées). De même la problématisation et la formulation de l’hypothèse doit émerger d’éléments concrets tirés du réel (graphiques, données épidémiologiques, résultats d’expériences, documents, observations microscopiques etc.).

La modélisation trouvera sa place plus tard, par exemple en bilan (là où on ferait classiquement un schéma fonctionnel).

Cette activité peut également représenter un approfondissement, que l’élève peut réaliser à son domicile, sur son ordinateur ou sa tablette. Cela signifie qu’elle peut également être menée à distance.

 

Présentation du modèle

Capture d’écran du logiciel Edu’modèles avec le modèle complet

Le modèle fourni aux élèves est très simple. Il est constitué de deux agents : des individus (qui peuvent être sains ou contaminés) représentés par des carrés, des moustiques (qui peuvent être porteurs de l’agent ou non) représentés par des cercles. Au départ, un seul individu est contaminé, aucun moustique ne porte encore l’agent.

Les individus n’ont pas de demi-vie (ils ne meurent pas de “vieillesse”) tandis que les moustiques ont une demi-vie assez courte (au bout de 100 tours, la probabilité qu’un moustique donné soit déjà mort est de 50%).

Une zone de couleur glauque au centre de l’écran matérialise le marais d’où émergent les moustiques adultes.  Les moustiques sont ainsi régulièrement renouvelés. A noter que plus la surface du marais est importante, plus il y aura de moustiques libérés.

Dans sa version incomplète, une seule règle algorithmique est implémentée, elle correspond à la “naissance” des moustiques (bien entendu tout le cycle de vie réel du diptère est ignoré, c’est un modèle !) dans le marais. L’élève n’a pas à y toucher.

Si l’élève exécute tel-quel ce modèle, rien de particulier ne se passe. Les moustiques sortent du marais et volettent aléatoirement, et les individus se déplacent tout autant aléatoirement. Personne n’est contaminé.

Dans sa version complète, “corrigée”, deux règles supplémentaires s’ajoutent à la première, elles correspondent à la contamination du moustique (lors d’un repas sur un individu infecté), puis à la contamination d’un individu sain par ce moustique.

En fonction du modèle fourni à l’élève, différentes approches sont possibles.

 

Première approche : demander à l’élève de modéliser la transmission de la maladie

La première approche consiste à donner à l’élève le modèle incomplet, et à lui demander de rajouter les règles modélisant la transmission de la maladie par le moustique.

Dans Edu’modèles, les règles correspondent à des rencontres entre agents, et s’écrivent comme des réaction chimiques, avec des réactifs et des produits.

Voici comment on saisit une règle dans Edu’modèles

La première règle sera celle de la contamination du moustique : à l’issue d’une rencontre entre un moustique et un individu contaminé, il reste un moustique contaminé et un individu contaminé.

moustique + individu contaminé --> moustique contaminé + individu contaminé

La deuxième règle sera celle de la contamination d’un individu :

moustique contaminé + individu sain --> moustique contaminé + individu contaminé

Une fois ces règles établieses, l’élève pourra constater que le paludisme se propage bien dans la population, et le rôle joué par les moustiques lui apparaîtra clairement.

 

Deuxième approche : demander à l’élève d’imaginer des stratégies pour freiner la transmission de la maladie

Dans cette approche, on fournit à l’élève le modèle complet et on lui demande d’imaginer comment le modifier (de manière réaliste) pour freiner la transmission du paludisme, en précisant comment on s’y prendrait dans la réalité. On demandera également à l’élève de mener des recherches (dans son corpus documentaire ou sur internet) pour identifier les conséquences négatives des solutions qu’il envisage.

La première solution avancée par les élèves est de supprimer totalement les moustiques (en cliquant sur “décimer cet agent”). En effet, il n’y a plus de transmission. Pour y parvenir dans la réalité l’élève peut suggérer l’utilisation massive d’insecticides, dont les conséquences néfastes sur l’écosystème sont évidentes.

Une autre approche serait de supprimer le marais. Dans le modèle, il suffit d’aller dans le menu des zones et de “gommer” le marais. Effectivement cela donne les résultats attendus. Il faudra donner aux élèves  des documents montrant l’importance des milieux humides pour le maintien de la biodiversité (en particulier chez les oiseaux).

Une troisième approche, très populaire chez les élèves, consistent à introduire des oiseaux ou des chauves-souris mangeurs de moustiques. Il suffit de créer un agent (chauve-souris par exemple) et la règle correspondante (consommation moustique, sans oublier celle de la consommation du moustique infecté). Cette solution fonctionne très bien mais est difficile à mettre en œuvre sur le terrain.

Beaucoup d’élèves penseront à introduire un “prédateur”, pas si simple à mettre en place dans la réalité hélas

Enfin d’autres propositions peuvent  émerger des élèves : construire un “mur” autour du marais, établir une zone “no man’s land” etc. Toutes doivent être accueillies avec intérêt et peuvent être discutées afin de développer l’esprit critique.

La création d’un “No Man’s Land” autour du marais limite considérablement la propagation de la maladie, mais ne l’empêche pas totalement.

 

Bilan

Au delà des simples objectifs notionnels du programme, cette activité permettra à l’élève de mieux appréhender ce qu’est, et surtout ce que n’est PAS un modèle numérique, d’en entrevoir le mécanisme, et ainsi les limites. Ce recul nous semble important, y compris pour développer la dimension citoyenne de l’individu.

 

Liens

Modèle incomplet

Modèle complet (corrigé)

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